Les naumachies consistaient en des combats sur l’eau, pratiqués par les Romains comme un spectacle. Les Grecs n’ont pas connu ce genre de jeu, le plus grandiose qu’aient inventé les Romains. Il fut en vogue surtout sous L’Empire. La première naumachie connue est celle que donna Jules César (-0100/-0044) à Rome en 46 av. J.-C. lors de son quadruple triomphe. Avant César, on n’avait guère vu que de timides essais de naumachies données sur mer. Après avoir fait creuser un bassin sur le Champ de Mars près du Tibre, capable de contenir de véritables birèmes, trirèmes et quadrirèmes, il mit aux prises 2 000 combattants et 4 000 rameurs, des prisonniers de guerre et de criminels condamnés à mort. Selon le nombre de rangs de rameurs les galères, navire à voiles et à rames, portent des noms différents : Une birème comporte deux rangs de rameurs de chaque côté. Une trirème comporte trois rangs de rameurs de chaque côté. Dans ce bassin, il fait rejouer une guerre ayant opposé les Phéniciens aux Égyptiens. Qu’importe si ladite bataille n’a jamais vraiment eu lieu, ce qu’il souhaite, c’est mettre un peu de sang dans son eau. Pour la première fois des navires de guerre de haute mer, presque équivalents d’une armée navale, se retrouvèrent à l’intérieur des terres. Les navires formaient deux escadres, et l’on désignait chacune d’elles par le nom de quelque nation maritime. Ordinairement, de petites barques circulaient, chargées de recueillir ceux qui tombaient à l’eau, mais ce n’était pas pour les sauver. S’ils voulaient s’échapper à la nage, des gardes, placés autour du lac ou du bassin, les repoussaient à coups de pique et les contraignaient ainsi de se réfugier dans les barques qui les ramenaient sur les vaisseaux pour courir de nouveaux périls. Les joutes navales étaient plus meurtrières que les combats de gladiateurs. Les empereurs Auguste (-0063/0014) puis Claude (-0010/0054) lui emboîtent le pas en orchestrant de nouvelles naumachies extrêmement sanglantes. Perses contre Athéniens, Siciliens contre Rhodiens… Mais ce bassin fut comblé par ordre d’Auguste (0037-0068), à cause des émanations étouffantes qui se proféraient de ses eaux stagnantes. Auguste fit établir un nouveau bassin le long du Tibre pour accueillir les 3000 hommes et les 30 navires et l’entoura de plantations. De nouvelles naumachies furent établies par ses successeurs, mais la plus célèbre fut celle qu’érigea Domitien (0051/0096). Elle était entourée d’une construction disposée en gradins pour servir de sièges aux spectateurs. Le lac Fucino servit aussi plusieurs fois, notamment sous Claude (10 Av J.C.- 0054), à ce genre de spectacles. Dans une naumachie donnée par Claude sur le lac Fucino, on aurait compté pas moins de 100 navires et 19 000 combattants ! C’est en 52 après J.C, la célèbre phrase attribuée à tort aux gladiateurs fut prononcée : Ave César, Morituri te salutante. On sait, en particulier par Suétone (0069-0125) - (Vies des douze Césars, Claude, XXI, 12­14) que les "naumachiarii" et probablement des prisonniers de guerre, avant le combat saluèrent l’empereur par une phrase devenue fameuse : "Ave, Caesar, Morituri te salutant". Claude, par inadvertance, répondit par la formule de bon augure : "Avete vos". A ces mots, les combattants s’écrièrent qu’ils avaient obtenu leur grâce, et se refusèrent obstinément à jouer leur rôle. Il fallut que Claude, les contraigne, moitié par promesses, moitié par menaces, à commencer la bataille. Bien qu’une tradition erronée s’en soit emparée pour en faire une adresse rituelle des gladiateurs à l’empereur, elle n’est attestée que dans cette seule occasion. Victimes de leur succès, d’autres batailles navales ont lieu dans les décennies suivantes. Sous Néron (0038-0068), un amphithéâtre est pour la première fois colonisé par l’eau, alors que la plupart des naumachies antérieures se cantonnaient à des lacs artificiels en périphérie des cités ou à des zones dont le relief naturel était plus favorable. Titus (0039-0081) organise quant à lui une naumachie plus modeste dans l’enceinte du Colisée en 80. Chose spectaculaire, il fait inonder le bâtiment en direct sous l’œil de spectateurs médusés. L’effet de surprise est garanti. On imagine la contribution en hommes et en animaux que coûta ce spectacle. La présence d’une trirème dans l’arène impliquait le démontage du navire pour franchir les corridors de la structure et son remontage à l’intérieur. Pour remplir d’eau l’amphithéâtre, l’opération prenait entre deux et cinq heures via un réseau pionnier de conduites d’eau et d’aqueducs souterrains. Mais plus facilement réalisable, elles étaient plus fréquentes, sans pour autant dire qu’il y ait eu banalisation de ce genre de spectacle : 8 en 50 ans. Enfin les grandes heures de la naumachie s’estompent avec la fin de l’Empire. Elles sont progressivement remplacées par des joutes navales, pacifiques et hautes en couleurs, qui prennent davantage la forme de compétitions sportives que d’affrontements sanglants. La dernière représentation bien attestée sous Trajan (0053-0117). Disséminés aux quatre coins de l’ancien Empire, de Mérida (Espagne) aux rives de la Moselle, les vestiges des bassins antiques sont aujourd’hui observés par les archéologues. Les ruines de l’amphithéâtre de Capoue présentent une disposition qui ne laisse aucun doute sur sa destination. En 2022, le Puy du fou nous fait revivre un combat sur une galère impériale. Pendant le spectacle, une centaine d’éléments de décor vont se mettre en action pour laisser apparaître, en 1 minute, une immense galère impériale (40 m de long, 15 m de haut et de 110 éléments motorisés, 75 moteurs, 700 m² de surface).