À chaque pays sa superstition, car si la couleur verte est réputée maléfique en France, en Italie il s’agit du violet (assimilé à la mort), en Angleterre, du vert et du bleu et en Espagne du jaune et rouge. La naissance de la peur du vert n’est pas clairement identifiée. La première serait liée aux dispositifs d’éclairage de scène au XIXème siècle (chandelles et lampes à huile, lampe à l’oxyde de calcium dite "chaud vive") qui ne mettaient pas en valeur la couleur verte et qui donnaient aux acteurs un teint cadavérique ou diabolique. C’est aussi la raison principale pour laquelle le bleu et le violet étaient à supprimer dans les pièces de théâtre, car la lumière rendait automatiquement ces couleurs, noirs et contribuait à une atmosphère lugubre. Il semblerait aussi qu’avec ce genre de lumière, on ne voyait que peu les interprètes portant du vert sur scène. Les Anglais avancent une autre explication, car à l’époque on jouait beaucoup à l’extérieur, sur des pelouses, dans la verdure, et là aussi, on distinguait mal les comédiens. La deuxième raison serait que la teinture verte au XVIIIe siècle était à base d’arsenic. Les costumes quotidiennement portés, quelquefois directement sur la peau, et dans des conditions difficiles telles que le trac, la chaleur, la sueur et les gesticulations des comédiens, auraient été source de nombreuses intoxications. Ce phénomène serait à l’oxyde de cuivre traditionnellement utilisé dans la confection de la teinture verte. À l’époque, on confectionnait la teinture verte avec le vert-de-gris, obtenu par l’oxydation de lamelles de cuivre avec du vinaigre, du citron ou de l’urine. Quelle magnifique couleur, mais ce pigment était instable, corrosif… et surtout, constituait un poison extrêmement violent qui se libérait lentement dans le sang des comédiens, qui pouvaient mourir empoisonnés. D’autre part, Molière (Jean-Baptiste Poquelin 1622-1673) serait mort sur scène habillé en vert pendant une représentation du "Malade imaginaire" le 17 février 1673, mais ce n’est qu’une légende car l’auteur a réussi à achever sa pièce. Mais le jour de son ultime représentation du "Malade Imaginaire", il aurait été habillé en vert. Il est décédé quelques heures plus tard, dans son lit, probablement de la tuberculose qui le minait depuis des années. Ce que l’on sait, c’est que le vert était la couleur préférée de Molière et se retrouvait dans de nombreux éléments décoratifs de son appartement. Autrefois, les théâtres étaient verts à l’intérieur mais à partir du 18ème siècle, ils ont été repeints en bleu puis en rouge. On dit aussi qu’au Moyen Âge, lorsqu’on jouait la Passion du Christ, le personnage du traître Judas portait une tunique verte et qu’il arrivait, après le spectacle, que le pauvre comédien soit malmené par la foule en colère. En Espagne, c’est le rouge car un toréador ne devrait pas voir cette couleur au moment de sa mort. Les accessoires utilisés en théâtre pouvant être dangereux, le rouge était proscrit tout simplement pour pouvoir repérer les éventuelles blessures et elle était à proscrire sur les vêtements des comédiens. Le jaune aussi était aussi à proscrire car faute à Faustino Barajas qui dans les années 30, a été tué à Madrid le jour où il arborait pour la première fois du jaune. De plus le jaune, l’intérieur de la cape du torero devient son linceul s’il est encorné. Cependant, le rouge fait partie du décor des cinémas et des théâtres, notamment concernant les sièges. Aujourd’hui, on ne teint plus les textiles de cette manière et les comédiens portant des costumes verts ne risquent plus l’empoisonnement, mais certains comédiens refusent toujours de porter du vert sur scène. Alors ces couleurs…. superstition propre à notre culture……. Ou pas ! Avec le développement du cinéma, le vert étant la couleur la plus éloignée de celle de la peau humaine, le fond vert est devenu l’outil le plus efficace pour effectuer des effets spéciaux. Les silhouettes sont plus faciles à détourer et les incrustations sont plus précises. Le cinéma a fait du vert son meilleur allié. Enfin, si vous voulez vous faire bien voir d’une comédienne, évitez de lui offrir des oeillets. Au 19ème siècle, quand un directeur de théâtre ne voulait pas renouveler un contrat, c’est la fleur qu’il envoyait dans la loge de l’actrice, tandis que les plus chanceuses recevaient des roses.